Nathalie Lebas-Vautier

Nathalie Lebas-Vautier est une pionnière. De celles qui ouvre la voie et le champ des possibles sur ce qui relevait jusqu’alors de l’utopie : faire de la mode une industrie plus respectueuse de la nature et des hommes. Avec Ekyog au début des années 2000, puis depuis cinq ans avec Good Fabric Nathalie innove et explore de nouveaux chemins en matière de textile et de stratégie RSE. Elle nous rencontre au siège de son entreprise près de Rennes.

13/10/21

Temps de lecture : 8min

Nathalie quel est votre parcours et comment Good Fabric est-il né ?

J’ai démarré ma carrière dans des grands groupes textiles, et dans ce cadre j’ai notamment beaucoup voyagé en Asie. En 2003, un an après avoir eu un bébé, je me suis interrogée sur mon métier et sur mon rôle de citoyenne. Je me suis aperçue que l’industrie de la mode était une des plus polluantes dans un monde à l’époque à faible conscience écologique. J’ai voulu alors prendre le pari de concilier ce qui à priori s’oppose : un modèle économique performant et un modèle écologique un peu plus vertueux même si, dès lors qu’on décide de produire, il y a nécessairement un impact. J’ai partagé cette idée avec mon mari qui a immédiatement adhéré. Nous avons rencontré un pionnier du coton bio en Inde avec lequel nous avons travaillé en créant Ekyog. Ce fut une aventure où l’humain était au cœur de l’action, nous avons appris notre métier d’entrepreneur au quotidien avec beaucoup de recherche & développement. Nous sommes sortis des sentiers battus car tout était nouveau à ce moment-là et perçu comme utopique. Nous avons jalonné ce parcours entrepreneurial avec un parcours associatif en créant Terre d’Ekyog, ce qui nous a permis de dépasser notre rôle économique et de financer à notre niveau des projets sur la biodiversité, la rotation des cultures, l’éducation ou encore l’eau potable.

Lorsque l’aventure Ekyog se termine, vous créez Good Fabric, racontez-nous…

Good Fabric est une entreprise en totale adéquation avec mes valeurs, où je me sens épanouie. C’est une entreprise de consulting à taille humaine experte en textile écologique. Nous privilégions la qualité de la relation et des projets que l’on mène. Good Fabric s’occupe du design, du développement et de la fabrication pour les marques. Nous avons également développé en partenariat avec Tilkal, un outil de traçabilité qui permet de calculer le cycle de vie d’un produit textile afin de structurer la démarche RSE de la marque. Chaque produit possède un QR code qui permet de le tracer.

« Il est important que la marque communique sur ce qu’elle sait faire de bien, mais aussi sur ce qu’elle doit améliorer »

Vous travaillez également sur le concept de “communication responsable”, qu’entendez-vous par là ?

Pour moi c’est une communication qui agit avant de communiquer et qui respecte les certifications et les allégations réglementaires. Aujourd’hui, les marques doivent être intègres et transparentes, le droit à l’erreur est humain, donc il est important que la marque communique sur ce qu’elle sait faire de bien et mais aussi sur ce qu’elle doit améliorer.

Quelles sont les marques qui collaborent aujourd'hui avec vous ?

Zadig et Voltaire, Balmain, Nature et Découverte, Fragonard et Biocoop parmi les plus connues. Nous travaillons uniquement sur la partie textile.

Nathalie, comment votre conscience écologique est née ?

Ce qui m’a sensibilisée c’est de devenir maman et l’envie de transmettre. Ma curiosité pour l’écologie est née en voulant rendre ma fille fière de moi. Je pense qu’il est important de connaître la portée que peuvent avoir nos actions sur l’environnement. On ne peut pas ignorer le monde dans lequel on vit en sachant que toute l’information est à un clic de nous. Les voyages m’ont vraiment ouvert l’esprit, en étant sur le terrain j’ai pu comprendre les enjeux qui varient d’un pays à un autre.

Comment intégrez-vous l'éco-responsabilité dans votre quotidien ?

Je pense être une « écolo » de bon sens, je mange à 95% bio, je trie mes déchets et j’essaye vraiment d’intégrer un mode de vie sain car la santé est primordiale pour moi.

Écologie et économie vont-elles bien ensemble ?

Je suis convaincue que l’écologie et l’économie sont intimement liées. Je pense que dans toute entreprise il y a 20% de dépenses inutiles à la performance de l’entreprise. Si ces 20% étaient employés à la création de valeurs écologiques pour l’entreprise, le monde se porterait mieux. Il n’est pas obligatoire de faire de grandes choses pour être vertueux à l’égard de l’environnement car chaque action compte. Il est inutile de mener tous les combats en même temps, il faut en choisir un et s’y atteler véritablement.

« Le droit à l’erreur est humain »

Une idée reçue autour de l'éco responsabilité qui vous énerve ?

Le fait de dire que c’est forcément plus cher. Certains secteurs comme l’alimentaire restent vraiment chers encore aujourd’hui, ce qui est dommage car tout le monde devrait avoir le droit à de bons produits, mais ce n’est pas vrai pour tout. Les institutions ont donné une image de contrainte et de prix élevés à l’écologie, alors que le « durable » est une vertu positive qui améliore drastiquement la qualité de vie. L’écologie c’est vraiment du bon sens.