David Mignot

Co-fondée en 2018 par David Mignot et Christophe Perrin, YesYes est une entreprise 100% normande qui récupère reconditionne et revend des appareils numériques. En créant YesYes, David ambitionne de réhumaniser et responsabiliser notre relation aux objets connectés. Rencontre avec cet entrepreneur qui a brillamment réussi à aligner ses compétences et ses valeurs. Il nous reçoit dans le premier atelier boutique de la marque à Caen, qui s'implantera prochainement dans plusieurs villes de France à la suite de leur récente levée de fonds de 2,7 millions d’euros.

17/03/21

David, d’où venez-vous et comment l’idée de YesYes est-elle née ?

J’ai effectué la totalité de mon parcours professionnel chez Sony dans les départements commerciaux et marketing pour terminer à la tête de Sony Mobile France. En 2015, j’ai suivi mon épouse qui a impulsé un changement de vie en quittant un poste de directrice RSE d’un grand groupe d’agro-alimentaire pour suivre une formation de naturopathie. Je prenais conscience à cette période que le modèle économique des smartphones était très néfaste pour la planète et j’ai donc décidé de quitter Sony sans avoir de projet derrière. A l’époque, j’étais persuadé de deux choses : je ne voulais pas créer mon entreprise et je ne voulais plus entendre parler de téléphone portable ! Quelques temps après j’ai recroisé Christophe Perrin avec qui j’avais travaillé chez Sony, et qui avait entre-temps monté des magasins de réparation de smartphones. Au cours de la discussion, il me parle de ses clients dont la plupart possèdent des téléphones ayant été mal reconditionnés. Nous arrivons ainsi tous deux au constat qu’il y a définitivement quelque chose à faire ! En effet, c’est un marché en plein développement, en totale rupture avec ce que nous avions connu à l’époque où les téléphones devaient être changés tous les six mois pour correspondre aux nouvelles tendances.

Vous avez donc finalement créé une entreprise… qui plus est dans la téléphonie !

Oui car nous avions conscience que le reconditionné était une bonne solution mais qu’il fallait le faire bien, avec qualité et confiance. Nous avons donc créé YesYes (Yes j’achète, Yes je vends, NDLR) autour de la promesse d’un reconditionné 100% positif ! Au départ, nous ambitionnions de créer une marque avec une vraie relation clients. Mais les choses n’ont pas été si simples au début, la première année a été compliquée, de nombreux doutes sont apparus. Et pourtant nous étions convaincus que nous étions dans le vrai, nous avons tenu bon, et puis petit à petit le business a décollé notamment grâce à la qualité de notre service et au bouche à oreille généré par la satisfaction de nos clients

Pourriez-vous détailler la démarche RSE de YesYes ?

La RSE est au cœur de l’entreprise. Nous avons une démarche environnementale réelle et authentique, le reconditionné l’est par essence. Dès le commencement du projet, nous avons également pris le parti de développer des emballages 100% éco-conçus et des accessoires durables et recyclables. Nos chargeurs et nos câbles sont certifiés MFi par Apple et sont garantis 10 ans. Nous sommes le seul reconditionneur en France à proposer ce niveau de qualité, pour la sécurité de nos clients mais aussi la durabilité de nos produits ! Nous privilégions systématiquement l’approvisionnement français dès que cela nous est possible. Nos produits sont essentiellement issus du marché français, 100% reconditionnés en France et 100% revendus en France. Pour ce qui est des pièces détachées et accessoires, nous attendons impatiemment le 1er fabricant qui rapatriera leur production en France !

Dans cette logique de RSE, nous privilégions aussi l’emploi local et la réinsertion : La majorité de nos techniciens est issue de la mission locale, ce sont des jeunes qui sont en échec scolaire ou professionnel.

En tant qu’entreprise, nous avons une responsabilité environnementale mais aussi sociale.
Je crois que mon moteur est le respect : celui de la nature, des collaborateurs et des clients.

Aligner l’entreprise à ses valeurs prend du temps, c’est un long chemin semé d’embûches mais il faut tenir bon.

« Aligner l’entreprise à ses valeurs prend du temps, c’est un long chemin semé d’embûches mais il faut tenir bon »

Vous venez de lever 2,7 millions d’euros auprès de fonds d’investissements à impact, quels sont vos projets de développement ?

Ce concept d’atelier-boutique dans lequel je vous reçois s’est dessiné très naturellement au fur et à mesure. Au début de l’aventure nous avions un atelier de réparation et nous vendions sur internet. Puis nous avons commencé à accueillir des clients dans notre atelier et construit une relation conviviale et de proximité avec eux. C’est sans aucun doute ce qui fait le succès naissant de YesYes ! Nous allons ainsi développer une quinzaine d’ateliers boutiques dans d’autres grandes villes de France. À l’heure des grandes plateformes et du tout internet, nous prenons le contre-pied en réinjectant de l’humain dans ce marché de l’électronique d’occasion. Par exemple, il n’est pas question d’ouvrir une usine pour réaliser des économies d’échelle.

Nous allons aussi étendre notre expertise à d’autres catégories de produits électroniques reconditionnés tels que les tablettes ou encore les ordinateurs. Nous avons d’ores et déjà depuis quelques mois élargi notre gamme aux consoles de jeux PlayStation 4 !

Cette levée de fonds va nous aider à poursuivre notre feuille de route responsable et respectueuse de la planète et des Hommes.

L’obsolescence programmée est-elle une réalité sur ce marché ?

Non, honnêtement je n’ai jamais constaté de telles pratiques, la durée de vie d’un smartphone est de 6 ans. Or, ce qui est réel, c’est que le consommateur a envie d’en changer régulièrement pour s’assurer d’avoir les dernières nouveautés. Il y a beaucoup de pédagogie à faire auprès des consommateurs. Ce n’est pas parce que la batterie d’un objet est fatiguée qu’il faut le jeter ou le changer complètement, il faut simplement remplacer la batterie. C’est le même raisonnement pour une voiture : lorsqu’un pneu est crevé, il n’est pas question de changer de voiture !

Quelles sont vos actions éco-responsables au quotidien ?

Je ne suis pas un écologiste au sens militant du terme. En revanche, je sens que j’ai une responsabilité vis-à-vis de la planète dont nous sommes locataires.

Au quotidien, nous consommons de manière très raisonnée, nous n’achetons que ce dont nous avons besoin. En termes d’alimentation nous privilégions les AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne, NDLR) et les produits locaux.
Le gaspillage est banni chez nous, je dirais que nous évoluons dans une sobriété heureuse.

Avec YesYes, nous avons le projet de travailler avec Hipli, le colis réutilisable, c’est très ingénieux.

Un de mes amis a également lancé The Treep une agence de voyages d’affaires éco-responsable qui propose de calculer l’empreinte carbone de son voyage d’affaires. Je trouve cela extrêmement pertinent !

L’idée reçue à laquelle vous aimeriez faire la peau ?

Que le reconditionné est systématiquement bon pour la planète. C’est faux, cela ne suffit pas. Le reconditionné qui vient de Chine, dont les composants font quatre fois le tour de la planète, ou qui sous-traite le reconditionnement dans d’autres pays, ce n’est absolument pas responsable.